dimanche 16 juillet 2017

UNE PENSEE POUR FREDERIC



J’ai toujours regardé avec envie les tableaux de Frédéric Bazille que possède le musée d’Orsay : mon préféré montre une réunion de famille, où sur la terrasse de la maison, les parents du peintre posent paisiblement pour la postérité… En regardant ces tableaux, il me vient l’envie de les rejoindre, pour m’introduire dans leur conversation et participer à ces éternelles collations…

J’ai donc été tout de suite enthousiasmée à l’idée de présenter l’exposition monographique organisée par le musée d’Orsay il y a quelques mois.
Grand bien m’en a pris ! Je ne connaissais que très superficiellement Frédéric Bazille ; et ce que j’ai découvert m’a émue et m’a fait redécouvrir son œuvre sous un autre angle.

Frédéric Bazille, Réunion de famille, terrasse à Méric, 1867-1868. Huile sur toile, 152 x 230 cm. Paris, musée d'Orsay Paris, acquis avec la participation de Marc Bazille, frère de l'artiste, 1905. Photo (C) RMN-Grand Palais (musée d'Orsay) / Hervé Lewandowski/ Service presse/musée d’Orsay.
Réunion de famille, terrasse à Méric, 1867 - 1868. Huile sur toile, 152 X 230 cm. 
Paris, musée d'Orsay
Car, au fond, que sait-on de lui ? qu’il a peint de jolis tableaux baignant dans une chaude lumière provençale ; qu’il a été un ami de Monet (qui le « tapait » régulièrement au début de sa carrière !) ; qu’il est mort à l’âge de 29 ans pendant la guerre franco-prussienne.
C’est à peu près tout. Je me suis contentée de ces quelques bribes biographiques pendant longtemps.

Grâce à cette exposition, j’ai découvert que Bazille était d’abord destiné à être médecin ; il commence à Montpellier ses études de médecine avant d’obtenir l’autorisation de ses parents de les poursuivre à Paris. Ce transfert lui permet en réalité de commencer un « double cursus » : il entre dans l’atelier de Gleyre et finira par abandonner la médecine pour se concentrer uniquement à la peinture. C’est donc là qu’il rencontre Monet, Renoir, … toute cette jeune génération que nous connaissons sous le nom d’impressionnistes.
Paris est le cœur de la bohème… Tous les artistes se côtoient quelque soit leur domaine de prédilection… La rencontre avec Edmond Maître, pianiste, sera capitale pour Frédéric Bazille.


Bazille, Frédéric ~ Summer Scene, 1869, Oil on canvas Fogg Art Museum, Cambridge, Massachusetts.jpg
Scène d'été 1869, Huile sur toile
Fogg Art Museum, Cambridge, Massachusetts


Cette exposition montre également une face largement méconnue de l’œuvre du peintre. Il n’y a pas que des tableaux pré-impressionnistes chez cet artiste. Son intérêt s’est porté sur tous les genres : natures mortes (superbes bouquets de fleurs), portraits, et un dernier tableau inspiré de la Bible. L’on sait également que le peintre inscrivit sur son livret militaire qu’il était peintre d’histoire.
Quelle drôle d’idée ! Cela pose une question essentielle : Bazille aurait-il été impressionniste s’il avait survécu à la guerre franco-prussienne ?
Doit-on y voir une envie de rentrer dans le rang ? Après tout, la famille lui avait accordé le droit d’arrêter ses études de médecine pour être peintre … Mais peintre d’histoire dans les années 1860 était plus acceptable que barbouilleur de paysages hostile à l’Académie (ainsi étaient perçus les futurs impressionnistes).
Lui qui se sentait terriblement à part, ne voulait-il pas au moins professionnellement parlant plaire à ses parents ?

Car la vie personnelle de Bazille est restée longtemps un mystère ; la bonne société du XIXè siècle (puis celle du XXè…) refusant d’ouvrir les yeux sur les préférences de ce jeune homme.
La famille mise au courant a dû protester ; vouloir le ramener dans le droit chemin…
Frédéric a voulu prouver qu’il était un « homme » ; un homme, ça fait la guerre… Comment expliquer autrement le fait que ce peintre pacifiste ait soudain eu une idée et une seule en tête, s’enrôler dans l’armée française pour combattre le prussien ? Et ce, malgré un élan de générosité du père qui était prêt à payer un remplaçant à son fils comme cela se faisait régulièrement à l’époque ?

Et comment ne pas comprendre dans la douleur folle du père en apprenant le décès de son fils, cet affreux sentiment de culpabilité qui ronge inlassablement ceux qui en sont atteints…


Musée d'Orsay - 1, rue de la Légion d'Honneur - Paris 7è - www.musee-orsay.fr

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